dimanche 29 juillet 2012

Saïd Bouziri: un acteur des luttes de l’immigration

Saïd Bouziri: un acteur des luttes de l’immigration par Hedi Chenchabi par Square Saïd Bouziri, dimanche 3 juin 2012, 21:51 · Un militant depuis toujours dans le 18 ème Né le 4 juin 1947 à Tunis et décédé à Paris le mardi 23juin 2009, Saïd Bouziri, arrive en France en 1966 pour poursuivre des études d’économie à Lyon puis à Paris. Il s’engage au lendemain des événements de mai 1968 dans la défense des droits des Palestiniens et des immigrés. Durant la deuxième moitié des années 1970, Said Bouziri milite dans le 18 ème arrondissement de Paris et plus particulièrement dans le quartier de la Goutte d’Or. Il a habité jusqu’à son décès dans cet arrondissement populaire, Bl Barbès. Dans ce quartier symbolique de l’immigration maghrébine qu’est la Goutte d’Or, il a mené plusieurs actions militantes et culturelles , il est l’un des fondateurs de l’ association culturelle de Barbes qui a lancé, en 1979 ; l’une des premières fêtes de quartier. Avec des amis, comme il dit, l’action était globale (permanence juridique, accès aux droits, animation du quartier, création d’une librairie rue Stephenson…). Après avoir été l’un des fondateurs des journaux Sans Frontière (1979-1986) puis Baraka (des expériences qui ont permis la diffusion d’une autre information sur l’immigration et les quartiers et de former une génération de journalistes et d’acteurs issus de l’immigration) , il fut aussi l’un des pionniers des radios libres : en juin 1981, il créée autour de la mouvance de Sans Frontière, la première Radio associative de l’immigration « Radio Soleil Goutte d’Or » dont l’audience est aujourd’hui nationale. Membre du Conseil d’administration du Fonds d’Action Social (FAS), du Conseil National des Populations Immigrées (CNPI), Saïd était dans les années 1986-1990 sur tous les fronts pour donner un avis, suivre des dossiers concernant l’immigration. Expert dans ce domaine, ses avis et analyses étaient fines, pertinentes et suscitaient l’attention des plus hautes autorités institutionnelles, associatives et syndicales. Défenseur acharné de l’accès des immigrés aux droits, en tant qu’associatif, il a su impulser un mouvement pour favoriser l’émergence et la reconnaissance de militants associatifs issus de l’immigration et pour favoriser leur implication dans différentes instances de concertation et de décision (Offices HLM, Syndicats, Réseau associatifs nationaux et locaux, Conseil d’écoles…), il considérait que la participation des étrangers est essentielle dans les quartiers ; car leur exclusion est une injustice , leur non participation à tout ce qui relève du droit commun est une erreur que les associations et militants de l’immigration doivent absolument travailler en partenariat avec les associations de solidarité et les acteurs de la société civile. Membre fondateur dans plusieurs association œuvrant dans le champ du social, de la formation, de la culture,… il a fait partie du Conseil d’Administration de la Fonda, il était avant son décès, pendant plusieurs années, Président actif de la LDH 18 ème, Trésorier national de la Ligue. Dans le 18 ème, il était le fer de lance de la votation citoyenne, qu’il a impulsé nationalement et localement. Saïd Bouziri participe en 1987 à la création de l’association Génériques dont il deviendra le deuxième Président. Responsable de la Commission immigrés de la Ligue des Droits de l’Homme, Saïd Bouziri a animé jusqu’à ses derniers moments la campagne de la votation citoyenne, en faveur de l’octroi du droit de vote aux étrangers aux élections locales. Le projet de création de l’association des amis de l’ICI (Institut Culturel d’Islam à la Goutte d’Or) lui tenait particulièrement à cœur, il considérait, comme à son habitude, que les laïcs de l’immigration, associatifs ou non, se doivent d’être présents dans cette dynamique d’ouverture aux cultures d’Islam. Saïd n’est pas un apparatchik associatif, il menait tous ces combats et ses engagements en étant salarié des Assedic. Engagé dans la vie syndicale jusqu’à sa retraite, Saïd Bouziri a gardé toute sa vie et quelles que soient ses responsabilités nationales une sensibilité particulière aux plus démunis dont les sans-papiers et à l’action de terrain. C’est ainsi qu’il a animé aux côtés notamment de l’anthropologue Emmanuel Terray le quatrième collectif des sans papiers qui a mobilisé de nombreux travailleurs irréguliers d’Asie. Directeur de publication de la revue Migrance, revue spécialisée dans l’histoire de l’immigration, Saïd Bouziri donnait le 11 juin 2009 le coup d’envoi à une grande exposition accueillie aux archives municipales de Lyon puis à la CNHI (de novembre 2009 à avril 2010- voir http://www.generiques.org) et qui s’intitule : Générations, un siècle d’histoire culturelle des Maghrébins en France. Pour lui les maghrébins sont intégrés dans la société française depuis longtemp, c’est leurs expressions dans divers domaines qui ont été passé sous silence. Faire connaitre cette histoire et ses multiples facettes est un devoir et un défi à relever pour les générations à venir. En 2009, Saîd a été particulièrement actif pour l’organisation de l’événement de l’année à la Goutte d’Or « L’Algérie à la Goutte d’Or »en mai et juin 2009. Ainsi en tant qu’habitant du quartier, il anima un débat sur la guerre d’Algérie dans ce secteur du 18 ème et supervisa avec AIDDA et Génériques la réalisation d’une exposition originale mêlant photographies d’archives et affiches. sur l’immigration algérienne et maghrébine et les luttes pendant la guerre d’Algérie. Une belle exposition d’affiches à l’ICI proposée par Générique donna à voir, sur plus d’un sicèle, un aperçu de l’expression culturelle des maghrébins en France. Pendant cet événement a été soulevée la question de l’hommage à rendre aux algériens du quartier de la Goutte d’Or pour les luttes menées durant la période .coloniale. Saïd s’est engagé à œuvrer pour cette reconnaissance mais pour lui, ce sera un hommage à toutes les luttes pour l’égalité que le 18 ème arrondissement et plus particulièrement la Goutte d’OR a connu de la Commune, aux luttes pour les indépendances, aux luttes contre le racisme, pour les droits des étrangers jusqu’aux Sans Papiers de Saint Bernard. Son vœu que nous souhaitons faire porter par la municipalité, c’est de passer une commande à un grand sculpteur pour la réalisation d’une œuvre dans le quartier de la Goutte d’ Or qui rappelle la mémoire des luttes pour l’égalité dans un esprit universel et fraternel. Malheureusement cette idée n’a pas pu se concrétiser à temps, il nous semble important qu’elle soit portée collectivement par tous les acteurs qui voient en Saïd un militant sincère, exemplaire qui a laissé des traces dans ce 18 ème arrondissement qu’il aimait tant.Il serait aussi important de réfléchir à rendre hommage à Saïd en donnant son nom à une place, un square, un lieu situé à la Goutte d’Or, un quartier qu’il aime et ou il a milité depuis les années 1970. Hedi CHENCHABI AIDDA