mercredi 26 octobre 2011

Les Tunisiens ont massivement répondu à l'appel des urnes

Les Tunisiens ont massivement répondu à l'appel des urnes


La grande inconnue est le taux de participation au vu de la multiplicité des candidats dans un paysage politique remodelé pour des élections dont, pour la première fois, les résultats ne sont pas connus par avance ( © AFP Fethi Belaid)
TUNIS (AFP) - Les Tunisiens se sont massivement mobilisés dimanche pour la première élection libre de leur histoire, en votant avec calme et émotion pour élire une assemblée constituante, neuf mois après la révolution qui a chassé Ben Ali et donné le coup d'envoi du printemps arabe.

Le président américain Barack Obama a félicité les "millions de Tunisiens" qui se sont mobilisés dans un pays "qui a changé le cours de l'Histoire et lancé le printemps arabe".

"Moins d'un an après avoir inspiré le monde, le peuple tunisien a effectué un important pas en avant. Je félicite les millions de Tunisiens qui ont voté pour la première élection démocratique du pays", a déclaré M. Obama.

Le taux de participation était visiblement massif selon la commission électorale (Isie), sans toutefois donner de précisions chiffrées sur l'ensemble du corps électoral.

Les résultats officiels seront annoncés mardi après-midi, a précisé le président de l'Isie Kamel Jendoubi.

"Je pense à mon mari qui a donné sa vie à notre chère patrie, à notre liberté", déclarait en pleurs Rabia Dalhoumi, veuve d'un des 22 "martyrs" de Kasserine, ville du centre-ouest qui a payé le plus lourd tribut à la révolution.

En fin d'après-midi, ni l'Isie ni les observateurs internationaux n'avaient constaté de dysfonctionnement majeur, même si Kamel Jendoubi a relevé certaines "irrégularités", notamment des "pressions sur les électeurs analphabètes" et des "SMS pour influencer le vote".

Crucial pour les Tunisiens, l'enjeu l'est aussi pour le printemps arabe: sa réussite ou son échec enverront un signal déterminant aux peuples qui se sont soulevés dans la foulée de la révolution tunisienne.

Londres et Bruxelles ont salué la tenue de ces élections et coïncidence du calendrier la Tunisie a voté le jour même où la Libye voisine a proclamé sa "libération totale" trois jours après la mort de Mouammar Kadhafi.

Les principaux responsables et chefs de partis tunisiens ont voté dans la matinée. "Cette affluence démontre la soif du peuple pour la démocratie", a déclaré Rached Ghannouchi, chef du parti islamiste Ennahda, favori de l'élection en votant à Tunis.

"Le peuple va construire une vraie démocratie", a assuré le président intérimaire Fouad Mebazaa en votant à Carthage, au nord de Tunis.

Les électeurs devaient choisir dimanche les 217 élus d'une assemblée constituante qui devra rédiger une nouvelle constitution et désigner un exécutif qui gouvernera jusqu'aux prochaines élections générales.

Les Tunisiens devaient départager 11.686 candidats, répartis sur 1.517 listes présentées par 80 partis et des "indépendants" (40%). Alors que la parité est obligatoire, les femmes ne sont que 7% à mener des listes.

Pour les Tunisiens, ce dimanche a constitué un authentique baptême du feu démocratique.

Voter avait perdu tout son sens sous Habib Bourguiba, le père de l'indépendance (1956) et n'était devenu qu'une formalité sous le règne de son successeur Zine El-Abidine Ben Ali, constamment réélu pendant 23 ans avec des scores défiant l'imagination (99,91% en 1994).

Visiblement le scrutin de dimanche devrait profiter au mouvement islamiste Ennahda, durement réprimé sous Ben Ali.

Son chef Rached Ghannouchi se réclame d'un islam modéré proche du parti islamo-conservateur au pouvoir en Turquie AKP, et promet de ne pas toucher au statut de la femme, le plus avancé du monde arabe, tout en prônant un gouvernement de large union.

Incapables de former un front anti-islamiste, les grands partis de gauche ont promis une vigilance de tous les instants pour défendre les libertés et le statut de la femme.

Le dépouillement devait commencer dès la fin du vote dimanche à 19H00 (18H00 GMT) et les premiers résultats étaient attendus dans la nuit.

© 2011 AFP