dimanche 2 octobre 2011

Le jour où le Sénat passe à gauche

Le jour où le Sénat passe à gauche
Au fil de la journéeLes sénateurs ont choisi le candidat PS, élu avec une large majorité. Suivez cette journée avec notre reporter au Palais du Luxembourg.

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Par Nicolas CHAPUIS


Au sénat, samedi 1er octobre (Nicolas Chapuis)
Pour la première fois dans l'histoire de la 5e république, le Sénat s'apprête à élire un président socialiste. Avec 177 sénateurs en sa faveur contre 170 de droite, Jean-Pierre Bel devrait s'installer au plateau, le perchoir local. Mais au Sénat, rien n'est jamais joué d'avance, et les négociations de couloirs peuvent toujours faire tout basculer.

Le discours de Jean-Pierre Bel a séduit à gauche. Frédérique Espagnac, sénatrice des Pyrénées-Atlantiques, souligne «l'émotion» créée par le nouveau président du Sénat, dont la voix s'est brisée à l'évocation de sa famille. «C'est un moment d'histoire», poursuit Espagnac, «mais il y a aussi une prise de conscience des responsabilités qu'on a maintenant». A droite aussi, l'intervention de Bel n'a pas laissé indifférent. L'ancien président du Sénat, Christian Poncelet, prédécesseur de Larcher, refuse de commenter le basculement de la haute chambre mais tient à «féliciter» l'élu.

L'autre prise de parole qui a marqué la journée, c'est celle du doyen Paul Vergès, qui a fait un long discours en rendant hommage aux Ultramarins (Vergès est élu de la Réunion). «C'était magnifique, il y avait un souffle, surtout par rapport au doyen d'avant», glisse Jean-Michel Baylet, en référence à Serge Dassault.



Et le vainqueur est...



Jean-Pierre Bel livre son premier discours de président, samedi après-midi.

C'est fait! Jean-Pierre Bel a été élu président du Sénat au premier tour. Avec 179 voix, il devance Gérard Larcher (134 voix) et Valérie Letard (29 voix). Il devient le premier président socialiste de la haute assemblée sous la 5e république.



Marie-Noelle Lienemann, «très émue»
La sénatrice a réagi pour Libération à l'élection de Jean-Pierre Bel, ancien habitant des HLM. «Maintenant, je pourrai dire à tos ceux qui s'opposent à avoir des HLM à côté d'eux : “Vous avez peut-être le futur président du Sénat qui habite là”».



Les élus dépouillent
Le dépouillement a commencé avec, ici, les sénateurs Frédérique espagnac et luc Carvounas.



Martine Aubry rejetée ?

Le ballet des Sénateurs continue a la tribune. L'atmosphère est plutôt détendue dans l'hémicycle. Les élus feuillettent le trombinoscope qu'on leur a remis, a la recherche des nouvelles têtes de l'assemblée. Certains sénateurs sont sortis pour discuter avec la presse. Des bruits de couloir s'échangent. Il semblerait que la primaire socialiste s'invite au Sénat. En effet, Martine Aubry devait passer dans l'après-midi, avant qu'on ne lui indique qu'il n'y avait plus de place pour elle en tribune ! En réalité, il semble que François Hollande étant dans le Sud et ne pouvant pas venir au palais du Luxembourg, ses troupes se sont débrouillées pour que sa concurrente n'en profite pas, à une semaine du premier tour. Les amabilités du débat n'ont manifestement pas cours au Sénat.



Le vote a commencé
15h40. Le vote a commencé, les sénateurs défilent un par un à la tribune sous le regard de Paul Vergès.



Samedi après-midi, les sénateurs votent.

15h30. Paul Vergès, en sa qualité de sénateur le plus âgé, fait le discours d'ouverture de la session. «L'histoire du sénat c'est l'histoire de la France», clame-t-il. L'élu de la réunion rend un hommage appuyé à Gaston Monnerville, le dernier président radical du Sénat. Son intervention est acclamé par une assemblée debout.

Enfin arrive l'heure du vote. Une lettre doit être tirée au sort, pour déterminer par quel nom de famille les sénateurs vont commencer à voter. Paul Vergès plonge sa main dans une grande jarre. La tension monte. Il saisit une lettre, hésite un peu en la voyant, prend une attitude de joueur de scrabble perplexe... W. Toute l'assemblée est hilare. C'est Dominique Watrin, sénateur du Pas-de-Calais qui va s'y coller. La séance est suspendue 10 minutes pour que chaque sénateur récupère les bulletins de vote.

15h00. Ambiance de rentrée des classes au Palais du Luxembourg. Les nouveaux élus découvrent peu à peu les lieux. "On a tout apprendre. Je ne sais même pas comment on va à l'hémicycle", lâche Michel le Scouarnec, sénateur PCF du Morbihan. Son collègue le sénateur vert Joël Labbé exulte : "C'est le début d'un grand jour, d'une nouvelle ère." Leïla Aïchi, élue écolo sur la liste de Paris, se fait prendre en photo entre les deux appariteurs à l'entrée.



Tout le monde attend l'arrivée de Jean-Pierre Bel. Quand il fait son entrée par l'escalier principal, une meute de journalistes l'enserre alors que des applaudissements de ses collègues de gauche montent. La séance peut commencer.



Larcher isolé

14h00. La droite va se présenter divisée pour l'élection. Gérard Larcher, le président sortant, n'a pas réussi à rassembler toutes ses troupes. Les centristes vont soutenir Valérie Létard dans la course au plateau. La sénatrice du Nord affirme que «ce n'est pas une candidature d'opposition à gérard Larcher. Mais le paysage politique sénatorial a été complètement bouleversé». Refusant «le système bipolaire» l'élue veut donner une nouvelle dimension à son groupe de sénateurs.



Le groupe a réussi à faire l'alliance entre toutes les composantes du centre, le Modem de François Bayrou, l'alliance centriste de Jean Arthuis, les radicaux de Jean-Louis Borloo, et la gauche moderne de Jean-Marie Bockel. Fort de 31 sénateurs, il s'est doté d'un nouveau nom, «l'Union centriste et républicaine». La course pour 2012 est bel et bien lancée avec cette nouvelle donne au Sénat.



Jean-Vincent Placé va et vient

13h00. Jean-Vincent Placé, le sénateur d'Europe écologie-les Verts (EE-LV) qui avait annoncé son intention de se présenter à la présidence du Sénat, devrait probablement se rétracter dans la journée. «J'ai obtenu que Jean-Pierre Bel nous envoie les éléments de langage de son discours. C'est important que l'on sache dans quelle direction il veut aller pour réformer le Sénat», a-t-il déclaré ce samedi matin à Liberation.fr.

Le sénateur vert justifiait son geste en affirmant vouloir bousculer les us et coutumes de la haute chambre. Il réclamait que Jean-Pierre Bel fasse son discours avant d'être élu et pas après. «C'est des pratiques qui remontent à la IIIe République et sont restées inchangées sous la IVe et la Ve. Moi je ne suis pas un sénateur de la IIIe république, mon objectif c'est la VIe», déclarait-il.

Si ce retrait se confirme, la route serait pleinement dégagée pour Jean-Pierre Bel, le candidat socialiste.
source libé