vendredi 25 mars 2011

Il revient "aux Libyens de décider" s'ils veulent se débarrasser du régime du colonel Kadhafi

Conflit/Libye: "c'est aux Libyens de décider" (Premier ministre tunisien à l'AFP)

TUNIS, AFP | 24.03.2011 | 19:03

Il revient "aux Libyens de décider" s'ils veulent se débarrasser du régime du colonel Kadhafi, a déclaré jeudi le Premier ministre tunisien de transition Béji Caïd Essebsi dans un entretien à l'AFP, en exprimant des regrets à propos de l'intervention militaire en Libye.

La Tunisie a par ailleurs gelé les avoirs du leader libyen pas de façon "unilatérale" mais pour se conformer à une décision de l'ONU", a indiqué à l'AFP une source proche du Premier ministre.

S'ils s'en débarrassent, a-t-il dit à propos de Mouammar Kadhafi", "c'est leur affaire, nous prendrons acte et nous continuerons à travailler (avec la Libye, ndlr). Nous reconnaissons les Etats, les régimes ne sont pas éternels", selon lui.

"Voyez chez nous, après 25 ans de dictature. Ici personne n'ira pleurer sur la tombe de ceux qui sont partis", a poursuivi le Premier ministre de Tunisie à propos de la chute du président Zine El Abidine Ben Ali, le 14 janvier après un soulèvement populaire.

Interrogé sur le déclenchement le 19 mars d'une intervention militaire internationale contre le régime libyen, M. Caïd Essebsi la regrette visiblement: "nous n'aurions pas souhaité cela, mais une fois que la communauté internationale, agissant au sein du Conseil de sécurité (de l'ONU), s'est exprimée, alors nous appliquons", a-t-il dit.

M. Caïd Essebsi a insisté sur le fait que la Tunisie s'est toujours "inscrite dans le respect des résolutions du Conseil de sécurité, surtout quand elles sont contraignantes et prise sous le chapitre 7", prévoyant le recours à la force en cas de non exécution.

"Pour nous, a-t-il rappelé, la Libye est presque une question de politique intérieure, nous sommes voisins et tellement liés par des relations séculaires, de solidarité et de coopération. Donc tout ce qui s'y passe nous touche".

Le chef du gouvernement a toutefois nuancé: "Il y a le peuple, l'Etat et le régime et il y a effectivement un problème de régime (en Libye). Le peuple s'est révolté, ce n'est pas nous qui allons le regretter, mais cela reste malgré tout une affaire interne".

Depuis le début du conflit en Libye, plus de 100.000 personnes ont fui vers la Tunisie, provoquant crise humanitaire pour ce petit pays lui-même en proie à une délicate transition démocratique depuis le renversement du régime de Ben Ali.

Tunis a par ailleurs gelé les avoirs du colonel Kadhafi.

"Ce n'est pas une décision unilatérale et la Tunisie ne fait que se conformer à une décision de l'ONU", a indiqué jeudi à l'AFP une source proche du Premier ministre.

La même source, s'exprimant sous couvert d'anonymat, n'a pas donné de précisions sur les avoirs que possèderait le dirigeant libyen, ni sur la date à laquelle cette décision a été prise.

Depuis le début de l'insurrection populaire contre le régime du colonel Kadhafi, au pouvoir depuis 42 ans, et surtout celui de l'intervention militaire internationale, la Tunisie est restée d'un grand mutisme et prudente sur la situation chez son important voisin.

La Libye est un partenaire essentiel pour la Tunisie, le second après l'Union européenne. 1.200 entreprises tunisiennes y vendent leurs produits, soit 7% des exportations totales tunisiennes, et le commerce bilatéral a représenté en 2010 environ 1,2 milliard de dinars (environ 600 millions d'euros).

Sans oublier les quelque 2 millions de touristes libyens qui viennent s'amuser ou se faire soigner en Tunisie dans des cliniques privées.

Selon la revue tunisienne Réalités, la Libye est le quatrième investisseur arabe en Tunisie et un grand pourvoyeur de produits pétroliers.