samedi 26 février 2011

Ce vendredi, des rassemblements monstres réclamant la démission du gouvernement ont eu lieu dans toute la Tunisie

Ce vendredi, des rassemblements monstres réclamant la démission du gouvernement ont eu lieu dans toute la Tunisie. Dans la capitale, la police parle de 100 000 manifestants. Olfa Riahi, journaliste, a elle aussi défilé. Elle nous raconte pourquoi elle n'a pas l'intention de s'arrêter.

C'était le 14 janvier 2011. Nous étions 40 000 devant le ministère de l'Intérieur, 40 000 à revendiquer l'abolition du système Ben Ali.

25 février 2011. Ben Ali est bel et bien parti, mais son système résiste encore. C'est donc dans ce contexte-là que notre crise de confiance face au gouvernement de Ghannouchi atteint son apogée. Et la question que se posent certainement les lecteurs de cet article est : qui sommes-nous ?

Nous sommes des centaines de milliers de citoyens tunisiens contre ce gouvernement de transition. Nous sommes revenus à la place de la kasbah depuis dimanche dernier et depuis, nous ne l'avons pas quittée. Nous sommes, en ce vendredi, des centaines de milliers à manifester dans la capitale tunisienne mais aussi à Sfax, à Sousse, à Monastir…

Nous sommes en ce « vendredi de la colère » des centaines de milliers de citoyens tunisiens à manifester dans les rues du pays contre le gouvernement de Ghannouchi et tant que nous n'aurons pas gain de cause, nous resterons dans les rues. (Voir la vidéo)


Un premier gouvernement de transition a été mis en place, avec pour Premier ministre monsieur Mohamed Ghannouchi. La nouvelle nous avait laissés perplexes dès le premier jour, perplexes malgré l'honnêteté apparente du Premier ministre, perplexes parce que même en supposant qu'il est honnête, la symbolique était sans appel ! Nous ne voulions pas du Premier ministre de l'ancien dictateur.
Un mouvement de contestation permanent

Un mouvement de contestation avait donc commencé à peine une semaine après le 14 janvier. Une caravane baptisée « Caravane de la liberté » avait quitté le gouvernorat de Sidi Bouzid le 22 janvier, annonçant le premier sit-in de la kasbah.

Pendant cinq jours, des manifestants venus de toute la Tunisie appelaient à la démission du Premier ministre et de son gouvernement.

Le 27 janvier, le Premier ministre a répondu au sit-in en nommant un nouveau gouvernement de transition constitué de plusieurs technocrates, certes « propres » mais sans aucune expérience de la politique et débarqués de pays européens où ils vivaient depuis des décennies et donc déconnectés de la réalité du pays.

Le lendemain, les manifestants restés sur place ont été dispersés à coups de gaz lacrymogènes, de matraques et de pierres. Le gouvernement avait annoncé ne pas avoir donné l'ordre d'évacuer la place de la kasbah et avait promis d'enquêter sur ce qui s'est passé.

Depuis, et même si le mouvement de contestation n'a jamais vraiment cessé, bon nombre de citoyens ont décidé de donner une chance à ce gouvernement de transition et à ces technocrates « propres », des citoyens surtout inquiets par rapport au devenir de la Tunisie sur un plan économique et sécuritaire. Des citoyens qui sont tout de même restés très vigilants.
Un gouvernement « incompétent »

Trois semaines après, le mouvement de contestation reprend de l'ampleur car le gouvernement ne cesse de prouver son incompétence et son inefficacité.

Le silence médiatique des chaînes de télévision et des radios nationales interpelle.

Les prises de décision du gouvernement de transition par rapport aux revendications sociales et salariales interpellent aussi car un gouvernement de transition n'est pas habilité à prendre de telles décisions.

L'absence de carnet de route des commissions d'enquête et de réformes politiques.

La non-dissolution du Parlement et de la Chambre des conseillers.

La crise sécuritaire du pays.

La non-transparence vis-à-vis des nouveaux partis.

La nomination de nouveaux gouverneurs et haut responsables d'institutions publiques ayant des liens directs avec l'ancien régime.

L'absence de réaction diplomatique face aux attaques directes du leader libyen Kadhafi lors de son premier discours.

L'absence de réaction diplomatique face au non-respect des journalistes tunisiens par l'ambassadeur français Boris Boillon.

Les visites des Américains dont Feltman, et les sénateurs John McCain et Joseph Lieberman.

L'inefficacité du gouvernement de transition en matière de rapatriement des ressortissants tunisiens bloqués en Libye.

Et la liste est encore longue…